Haitian Chen
DNSEP Design, 2021 - 2022
« L’oppression de l’enfance, en particulier la domination de mon père et l’odeur des fruits, m’ont marqué depuis longtemps. Mon père adore les fruits, il en mange un ou deux après chaque repas, il y a toujours des fruits chez moi. Même si parfois mon père n’est pas à la maison, quand je regarde ces fruits, j’ai l’impression que mon père est présent. Mon père me gouverne comme le fruit me domine. Debout dans le vide de cette chambre abandonnée, regardant le trou de la fenêtre, les souvenirs flottant dans mon esprit, j’essaie de m’ouvrir et d’établir de multiples connexions avec cet espace. Soudain, je me fonds dans cette pièce, et cette chambre devient aussi douce, se mélange avec moi.
La chambre, c’est l’endroit où nous restons le plus longtemps dans la vie ; naissance, repos, lecture, écriture, rêverie, sexe, mort − tout cela s’y passe. Il semble que mon existence soit toujours enveloppée et fermée par la chambre, ce qui me donne envie de m’échapper, mais où pourrais-je aller ? Dans La Poétique de l’espace de Bachelard, il y a le terme “non-moi” − c’est quoi le non-moi ? Bachelard l’explique : “les valeurs de l’espace habité comme le non-moi qui protège le moi.” À mon avis, composé de non et de moi, ce terme est certainement un déni de moi, il n’existe pas objectivement, mais plutôt comme un sens. Le sens de la chambre, personne ne le connaît mieux que le poète : C’est ta chambre pourtant Puisque c’est d’où tu pars. (Louis Aragon)
Les trois salles investies lors de mon diplôme sont comme mes trois chambres : une chambre in-situ, une chambre noire, une chambre de white-cube. Le spectateur est guidé par moi à travers des souvenirs abandonnés, des regards subtils, des moments répétés et le vide pour entrer, sortir et rentrer. »
Une chambre avec vue sur la mer (2021)
Film, 12’52 »
Annecy, Paris